6 Mars 2018. En mars 1978, par une nuit de tempête où les rafales atteignaient 120 km/h, l’Amoco Cadiz, un pétrolier géant battant pavillon libérien, se brise sur les rochers de Portsall (Nord-Finistère) avant d’infliger au Trégor la pire catastrophe écologique de son histoire. Onze ans après la première marée noire du Torrey Canyon.
Au soir du 16 mars 1978, victime d’une avarie de barre alors que la tempête fait rage et que les négociations entre l’armement et la compagnie de remorquage ont retardé l’intervention des secours, l’Amoco Cadiz talonne sur les hauts fonds de Portsall (Nord-Finistère). L’équipage du pétrolier de 330 m de long est sauvé mais sa cargaison s’échappe immédiatement de sa coque éventrée. En cinq jours, ses 230 000 tonnes de mazout se déverseront dans la mer puis sur les côtes nord-bretonnes. Celles du Trégor seront les plus touchées.
Le 20 mars, les premières nappes sont repérées en baie de Lannion entre Beg ar Forn et la pointe du Sehar. Des traces sont aussi vues sur la plage de Tresmeur et au port de Trébeurden, ainsi qu’aux abords des Triagoz. Quelques heures plus tard une nappe de 10 km est repérée entre les Sept îles et la côte où elle viendra s’échouer, le port de Locquémeau est touché à son tour. Et, comme en 1967 lors du naufrage du Torrey-Canyon, les pouvoirs publics sont dépassés. Le 22 mars, 150 personnes investissent la sous-préfecture de Lannion au cri de « marée noire y’en a marre, promesses ras le bol ». Le lendemain, ils seront un millier à manifester dans les rues de la ville. De son côté, le député-maire, Pierre Jagoret, transmet « en haut lieu à Paris »,une pétition ayant recueilli des centaines de signatures dénonçant notamment, « les scandaleuses carences du gouvernement qui a purement et simplement démissionné devant les conséquences de l’accident de l’Amoco Cadiz » et exigeant que « la loi anticasseurs soit appliquée aux pollueurs ». Mais rien n’y fait et des dizaines de milliers de tonnes mazout submergent le littoral pendant deux mois, la marée rapportant presque chaque jour ce qui avait été enlevé la veille. Les pêcheurs en sont les premières victimes et le paieront au prix fort.Les deux mille militaires mobilisés pour l’occasion, principalement des appelés, assureront l’essentiel du nettoyage jusqu’à la fin juin. Avec, pendant quelques semaines, le renfort apprécié de près de deux cents pompiers allemands. Mais il leur sera impossible de remettre toutes les plages dans leur état initial avant la saison estivale. Ce seront, finalement, les tempêtes d’automne qui s’en chargeront quelques mois plus tard.

Aux pires heures de la marée noire, les pompes à lisier des agriculeurs en intervention sur la plage de Tresmeur à Trébeurden. DR

Les jeunes militaires, ici à la plage de Beg-Léguer à Lannion, travaillaient « à la chinoise » en se passant les seaux pour remonter le mazout. | DR
Et la chanson d’Alain Barrière plus que jamais d’actualité