
Une des 13 baleines à bec de Cuvier échouées dans le Golfe de Kyparisiassis, en Grèce, en 1996, après l’utilisation de sonars navals dans la zone. Photo copyright Pelagos Cetacean Research Institute
19 Février 2018. Principe simple et écologique, l’utilisation de bulles d’air permet de mettre les cétacés à l’abri de la pollution sonore sous-marine qui, en raison de l’activité humaine, désoriente les mammifères marins (Ndlr Sibylline : ou les tue !).
La journée mondiale des baleines ce lundi permet d’attirer l’attention sur ce mammifère marin dont certaines espèces sont souvent fragilisées : pêche, braconnage, pollution de l’environnement, mais surtout : pollution sonore !
La pollution sonore sous-marine des moteurs de bateaux ou des travaux de forage désoriente les cétacés. Pour les protéger, une entreprise réunionnaise de travaux publics a décidé d’utiliser « un rideau de bulles » pour atténuer le bruit de ses travaux de la nouvelle route du littoral (Ndlr Sibylline : grand projet inutile, fort coûteux et destructeur de la biodiversité marine ; cf. articles précédents sur le sujet).
Procédé écologique de 1910
Ce rideau ou cette barrière faite de bulles d’air est l’une des spécialités des enseignants chercheurs de l’école d’ingénieur de Brest, l’Ensta qui utilise un principe simple et écologique. Michel Arrigoni, enseignant chercheur, est spécialiste en sciences des explosions. Son département collabore, comme d’autres sections de l’école d’ingénieur, avec les entreprises comme celle de La Réunion qui utilise actuellement ce dispositif.
« Si on envoie une onde dans l’eau, elle va rencontrer les bulles et on va avoir une multitude de phénomènes physiques qui vont faire qu’on va absorber l’énergie du choc. Lorsque l’onde va traverser ce rideau de bulles, elle va être fortement atténuée. »
Cela peut paraître surprenant, mais l’atténuation peut aller jusqu’à « 25 décibels » de moins. « On peut atténuer de 90 %, estime le chercheur, voire plus ».
Ndlr Sibylline : Si l’atténuation peut aller jusqu’à 25 dBs et que cela représente une diminution de 90 %, cela signifie que le bruit, dans ce cas précis, est de 27,7 dBs, ce qui correspond à une voix chuchotée. S’il double, le gain est de 3 dBs (échelle logarithmique, bruits de niveaux équivalents), ce qui correspond au bruit d’un lave-linge.
Un canon à air d’un bateau de prospection sismique (détection des gisements de pétrole/gaz) émet des ondes sonores allant jusqu’à 260 dbs à quelques secondes d’intervalle.
Ne s’agit-il pas de pression (exprimée en dB re 1 μPa m) plutôt que d’intensité (dB) ? Et les 90 % ne correspondent-ils pas au SEL90 de Madsen (2005) ?
Dans la négative, il s’agirait donc d’une mesure « cosmétique ».
Si l’on parle d’intensité sonore, qu’en est-il de la fréquence, de la durée, etc…, avec quelles conséquences sur TOUTE la faune marine ? Dans l’eau, le bruit se propage de manière omnidirectionnelle (dans toutes les directions ; la pollution sonore occupe donc tout l’espace) et à une vitesse supérieure : 1500 m.s-1, à une température ambiante de 20° C contre 340 m/s dans l’air à cette même température (soit 4 fois plus vite). Cette célérité varie en fonction de la température en surface, de la pression en profondeur, etc…
Sur son site, l’ENSTA considère les dommages corporels aux dauphins comme une modification permanente du seuil d’audibilité (source), probablement par analogie à l’oreille humaine qui n’a pas du tout le même fonctionnement. Or, le bruit, lorsqu’il est répété et selon sa fréquence, sa durée et la distance entre la source d’émission et l’animal, lèse des organes vitaux pouvant entraîner la mort de l’individu par hémorragie interne, par exemple. C’est ce que l’on observe lors de l’utilisation des sonars actifs basse fréquence (LFAS, armée).
Si la volonté de minimiser l’impact sur les cétacés (quid des autres animaux ?) est une bonne chose, il est néanmoins indispensable de connaître la base des conséquences des ondes acoustiques sur les organismes marins afin de ne pas sous-estimer les solutions à apporter.
Nos grands amis de la DGA (Direction Générale de l’Armement) soutiennent l’ENSTA. C’est étonnant !
La technique du rideau de bulle existe depuis 1910, mais les chercheurs l’ont revisité notamment avec des moyens numériques pour la rendre plus précise.
Technique militaire
Les bulles sont aussi utilisés dans l’armement explique Michel Arrigoni : « L’armée utilise les rideaux de bulles pour réduire les effets des opérations de déminage sur l’environnement. » (Ndlr Sibylline : et pour les sonars ?)
Les bulles ont l’avantage d’être écologiques mais elles demandent quand même beaucoup d’énergie pour insuffler l’air.
Les travaux pourraient s’étendre maintenant à des rideaux de bulles pour les navires eux aussi responsables de nuisances sonore.
Plus d’informations : Rideaux de bulles d’air (lien)